Ce Barbier de Séville, enregistré live en 2011 sur la scène du Teatro Regio de Parme, nous laisse perplexes : autant la mise en scène de Stefano Vizioli se montre enjouée et agréable à suivre, autant la musique fait souvent défaut pour qui à l'oreille sensible et attend donc beaucoup de l'écriture raffinée de Rossini.
L'opéra est représenté en costumes d'époque, basés sur les dessins d'Annemarie Heinreich, parfaitement réalisés et judicieusement portés par l'ensemble de la distribution. On remarquera toutefois de petits anachronismes à l'Acte I parmi les instrumentistes présents sur scène, car leurs instruments ne sont pas d'époque. Ainsi, voit-on une flûte traversière en métal qui n'existait pas encore en 1816, lors de la création du Barbier de Séville ! Mais ceci est un détail au sein d'une production globalement fort agréable qui s'entend à valoriser chacun des rôles du livret.C'est en fait bien l'aspect musical qui laisse vraiment à désirer, à commencer par le jeune chef Andrea Battistoni - il n'a pas 30 ans - dont on dit qu'il est déjà très talentueux. S'il parvient à mener à bien l'opéra sans soulever de gros problème, on trouvera, en revanche, son Ouverture bien peu convaincante. Aucune dynamique, une battue très scolaire et uniforme pour cette page très célèbre exposée sans relief ni couleur, juste "expédiée"!
Quant aux chanteurs, si le Comte Almaviva de Dmitry Korchak nous convainc par son timbre et nous laisse espérer une distribution de qualité, Luca Salsi, dans le rôle de Figaro, chante faux dès son entrée en scène. Ses récitatifs sont tellement exagérés que l'on peine à entendre la musique qui les sous-tend. Les mots sont outrageusement accentués, vidés de toute ligne musicale. Du reste, quasiment tous les récitatifs de ce Barbier subiront semblable traitement, à l'exception de ceux interprétés par Dmitry Korchak.
Le personnage de Fiorello (Gabriele Bolletta) présente une voix sans relief et qui détonne. Il en est de même, et ce dès son entrée, avec la Rosina de Ketevan Kemoklidze, qui a tendance à chanter un peu trop haut, et dont la voix très imprécise ne projette quasiment rien dans le registre grave. Trac, fatigue ? Curieusement, les choses auront tendance à s'arranger pour elle à l'Acte II.
À l'instar du Comte, le Don Basilio de Giovanni Furlanetto émerge de la distribution par la qualité de son timbre et son jeu de scène humoristique qui le rend aussi assez sympathique. Quand à Don Bartolo, le vieux tuteur jaloux, il se montre assez poussif tout au long de l'œuvre, et Bruno Praticò se permet même de ralentir les vocalises par manque de technique. Au second Acte, il réussit cependant à peu près bien les tirades de mots enchaînés très rapidement, ce qui le fait sortir un moment d'un forme de torpeur et rencontre les applaudissements du public.
L'Acte II apporte de fait quelques "consolations", avec notamment un duo bien plus riche sur le plan musical entre Figaro et le Comte. Mais il est vrai que cette combinaison de voix n'est pas ouverte à la fantaisie. On notera aussi que le chant de Rosina se montre plus juste…
Le final se déroulera sans superbe, et la représentation sera tout au plus saluée poliment. En tant qu'œuvre de Bel Canto, Le Barbier de Rossini exige des voix magnifiques, à la technique très performante. Tel n'est pas le cas dans cette production de Parme, plutôt réussie sur le plan visuel, mais si pauvre quant à la musique…
À noter : l'Acte I est proposé sur le DVD 1 (101'58) ; l'Acte II sur le DVD 2 (67'30).
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Daniel Barda