Le présent enregistrement est une vraie réussite pour ce qui est de la qualité de la prise de son, chose jamais facile avec l’orchestre de Mahler. En effet, avec la Cinquième Symphonie, le compositeur aborde une maturité tant du traitement textuel de son langage que de celui de l’orchestre aux proportions géantes et sonores.
L’enregistrement live est d’une clarté limpide et ne présente aucun excès, aucun manquement au moindre détail dont le compositeur est si riche.
On regrette d’emblée qu’il n’en soit pas de même pour l’interprétation du chef dont on a salué l’excellence, à propos de nombreux enregistrement réalisés sous sa baguette. Y compris chez Mahler, avec la plus belle Résurrection de la discographie, qu’il a réalisée chez Decca en 1975 avec le Philharmonique de Vienne.
La Marche funèbre initiale nous fait immédiatement entendre cet orchestre magnifique où règne une totale homogénéité à l’intérieur de chaque pupitre, notamment chez les cuivres. Cette clarté est assez représentative du style de Mehta, un chef dont la technique de direction est incroyablement précise et lisible. On constate assez vite aussi, en dépit d’une perfection d’interprétation sur laquelle rien n’est critiquable, une nette distance entre le texte et le chef. Son manque d’engagement est flagrant ici et n’est pas conforme à ce qu’on est en droit d’attendre d’une telle partition.
Curieusement, quand on connait le tempérament souvent enflammé de Zubin Mehta, le second mouvement - Stürmisch bewegt - Orageusement animé - n’est que bien peu… orageux. En effet, le chef ne l’aborde ni dans la fureur ni dans le grondement tellurique qui le caractérise. Partant, l’écriture apparaît presque banale ou ne nous surprend guère, contrairement à ce que Mahler concevait probablement. Poussant à l’extrême notre opinion, on dira qu’on s’y ennuie presque.
Le mouvement 3, le Scherzo, est sans double plus réussi. On y retrouve une volonté de confronter les éléments véhéments qui en constituent le matériau thématique et qui le structurent. On retrouve avec plaisir l’énergie qui jusque-là faisait trop souvent défaut : l’orchestre est plus virtuose que jamais et suffit à lui seul à nous ravir là où la symbiose entre la partition et le jeu inouï des pupitres devrait en être la cause.
L’Adagietto est enfin digne du chef qu’on admire tant, rappelons le, dans les grandes pages de la musique romantique. Il y dose si subtilement les emportements émotionnels et la seule force souveraine de la partition sans jamais tomber dans un excès coupable.
Zubin Mehta est ici plus impliqué, comme si, seulement à cette étape de l’ouvrage, il entrait en religion avec lui.
Enchaîné, le Rondo-finale, une des rares pages heureuses et solaires de la symphonie chez Mahler (avec celles de la Symphonie n° 3), nous régale à nouveau de la splendeur de cet orchestre, servi nous le répétons par une prise de son idéale, où tout s’entend et où jamais la masse sonore impressionnante de l’orchestre mahlérien n’est écrasée.
Pour le régal d’entendre un si bel orchestre en direct, si bien enregistré, bien plus que pour cette Cinquième Symphonie, ce SACD trouve son mérite mais hélas pas vraiment sa place au sein d’une discographie si riche d’interprétations autrement plus convaincantes.

À noter : Ce SACD hybride est compatible avec tous les lecteurs de CD. Pour bénéficier des pistes multicanales et stéréo encodées en DSD, il faut utiliser un lecteur SACD.
Gilles Delatronchette






























