La première impression sonore qui frappe à l'écoute de ce disque est la qualité individuelle de chaque voix. Susan Hellauer (plage 5), Jacqueline Horner-Kwiatek (8), Ruth Cunningham (11) et Marsha Genensky (14) atteignent la perfection dans le très difficile exercice du chant solo a cappella. Aucune respiration, aucun phrasé, aucune nuance de l’anglais du Moyen-Âge n'échappe à l'attention de ces quatre artistes de talent. Mais la mixture magique de l'association vocale opère également tour à tour à deux, à trois ou en quatuor, et l'on éprouvera beaucoup de plaisir à en suivre les méandres sinueux mais parfaitement conduits.
On aurait pu craindre une certaine monotonie dans ce programme thématique, mais il n'en est rien. En effet, une écoute soutenue, livret en main, permettra d'apprécier une variété stylistique entre les morceaux. Ainsi, certains présentent une écriture polyphonique recherchée, d'autres sont plus populaires et clairs dans leur texture. Par exemple, une différence apparaîtra entre les noëls Nowel syng we bope al and som et Mervele noght Iosep.
Les deux pièces issues des manuscrits les plus anciens sont des textes chantés en latin datant du XIVe siècle irlandais, évoquant plus le monde de la messe religieuse que la chanson populaire en langue vernaculaire.
Nous porterons également une attention particulière aux morceaux The Shepherd's Star, A Virgin Unspotted, Star in the East, Bethlehem et The Cherry Tree Carol, lequel donne son nom à l'album. Une écoute distraite pourrait tromper aisément l'auditeur. En effet, ces mélodies de la fin du XVIIIe et des débuts des XIX et XXe siècle sont des adaptations harmonisées de textes anciens dans un style plagiant les vieilles formules médiévales ou de la renaissance. Mais l'homogénéité stylistique est tellement réussie, et les chanteuses si justes dans leur approche que l'espace des siècles s'estompe sans problème.
Dans sa simplicité monophonique, le song Qui creavit celum (Lui qui créa les cieux) chanté par Jacqueline Horner-Kwiatek se montre très touchant. Les syllabes répétitives à la fin de chaque strophe et son allure très douce de berceuse sont en parfaite accointance avec la teneur d'un texte évoquant la tendresse, la douceur et la joie d'une mère à la naissance de son fils.
L'absence d'effet de style, de maniérisme, associée à une rigueur musicologique sans faille, elle-même combinée d'un naturel et d'une souplesse désarmants fait de cette musique pourtant si lointaine une juste vérité fort appréciable de nos jours.
À noter : Ce SACD hybride est compatible avec tous les lecteurs de CD. Pour bénéficier des pistes multicanales et stéréo encodées en DSD, il faut utiliser un lecteur SACD.
Nicolas Mesnier-Nature

























