Nous sommes transportés dans une petite ville, peut-être de la banlieue parisienne à l’époque contemporaine et l'on passe d’un lieu à l’autre via Google Earth. Nous nous trouvons donc bien loin de l’Écosse du XIe siècle où était censé se dérouler ce Macbeth de Verdi.
Mais notre guide n’est autre que Dmitri Tcherniakov, l’enfant terrible de l’opéra actuel, qui a la fâcheuse habitude de prendre les livrets à rebrousse-poil pour mieux en extraire toute l’actualité et la force, pour exemple ce Dialogues des Carmélites que nous avons également critiqué.Ce détournement s’accompagne ici dans le même temps d’une tentative de réhabilitation du traître Macbeth. Cette dernière, avouons-le, ne prend pas. Mais pour le reste, il est vrai que le passage au crible du microcosme des petites villes fonctionne bien. Le recours à ce pseudo Google Earth, au contraire de représenter un gadget racoleur, s’avère un outil efficace pour le spectateur afin de bien saisir la petitesse de l’espace, avec ces gens de tous milieux qui se côtoient sans se connaître et parmi lesquels les plus grandes tragédies peuvent se dérouler. Ce ressort agit formidablement sur le proche et le lointain. On se prend soit pour un oiseau, soit pour Dieu en regardant de haut cette petite communauté mais, dans le même temps, il nous permet de rentrer dans le quotidien de ces gens et de réaliser que, quelque part, nous n’en sommes pas si éloignés.
Au final, Macbeth en ressort plus proche que jamais de son épouse sans pour autant en sortir réhabilité mais peut être un peu mieux compris, ce qui n’est déjà pas si mal. D’autant que les interprètes sont de tout premier ordre…
L’Orchestre de l'Opéra de Paris, tout d’abord, surprend par sa vivacité et ses couleurs sous la direction - à mains nues - de Teodor Currentzis, l’un des piliers de l’Opéra de Novossibirsk, qui souligne des détails souvent négligés de la partition, insufflant des micro-accents insoupçonnés qui lui apportent une vie, un dynamisme et une jeunesse bienvenus. Sous son impulsion, les cordes revêtent un galbe tantôt dramatique tantôt sensuel, tandis que les cuivres sonnent à plein poumon. Teodor Currentzis nous offre ainsi une relecture passionnante de ces pages maintes fois interprétées.
Côté voix, le couple Dimitri Tiliakos/Violeta Urmana fonctionne à merveille. Sans offrir de timbre particulièrement remarquable, il brille surtout par son implication, son intensité et son harmonie.
Nous avons également été tout particulièrement touchés par le Banco de Ferrucio Furlanetto, d’une profondeur de timbre appréciable, mais surtout d’une humanité bouleversante.
Épurée dans ses décors, cette production de Macbeth impressionne et interpelle dans son attention méticuleuse aux détails. Pas un rôle ne se trouve négligé et tous participent à l’expressivité du groupe. Un vrai travail de troupe, beaucoup plus profond que pourraient le laisser présager les images médiatiques du chef et du metteur en scène.
À noter : Un menu au design et à l'interaction assez ludiques nous accueille après les mentions légales et logos habituels.
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Jean-Claude Lanot