Inattendue, cette transposition de l’argument de l'opéra de Bellini dans une salle de répétition d’opéra des États-Unis où l'on travaille précisément La Sonnambula, en lieu et place d’un village suisse du XIXe siècle !
Mais cela fonctionne !
Dans un monde où les choses ne sont pas ce qu’elles semblent être ou renvoient à ce qu’elles ne sont pas, cette mise en abîme est parfaitement efficiente et donne une vivacité appréciable à un livret somme toute assez pâlot.Rappelons d’ailleurs à cette occasion qu’il s’agit de l’histoire d’un jeune couple dont la fiancée pénètre durant son sommeil dans la chambre d’un autre homme.
D’où complications, annulation de mariage, puis…. Retournement de situation et réconciliation (qui se déroule ici lors de la représentation fictive de l’opéra).
Le résultat est donc fort coloré, changeant et plein d’énergie, à l’image de son interprète principale.
Toujours aussi engagée qu’à son habitude, Natalie Dessay ne peut qu’enthousiasmer par son entrain, sa verve (sa chorégraphie !).
Seul hic : ces qualités ne s’épanouissent vraiment qu’à partir de l’Acte II, et il en est de même pour son partenaire, Juan Diego Flórez.
Ce dernier souffre d’ailleurs d’un réel défaut de projection, avec une voix haut placée qui ne parvient ni à séduire ni à émouvoir. Dès lors on en vient presque à comprendre que sa fiancée aille chercher ailleurs !
Précisons également que la mise en scène de la fin de l’Acte I impose à la chanteuse de bien s’accrocher pour pousser ses notes !Mais ces légers bémols introductifs ne sauraient nous gâcher l’immense bonheur partagé de l’Acte II, réellement émouvant quand les amants se séparent, avec des arias subtilement interprétées et, notamment, des pianissimi bouleversants.
Sans oublier le bal final, dans lequel Natalie Dessay sort le grand jeu, se fait plaisir et nous ravit de fait.
Plus généralement, le langage bellinien est ici parfaitement compris et maîtrisé, avec un orchestre idéal, moelleux à souhait, dirigé avec un vrai sens de la vocalité et du beau chant par Evelino Pidò.
Peut-être pas la meilleure retransmission du Met disponible en DVD, mais une très belle production.
Jean-Claude Lanot