L'incrustation de l'image de l'orchestre dans le cadre de scène confine notre vision dans une surface au centre de l'écran et, de fait, étrique la sensation de grandeur musicale voulue par le compositeur. Ceci ne présage de rien de bon, d'autant que l'acoustique n'est guère panoramique.
Le rideau se lève enfin sur les décors et les costumes très convenus signés respectivement de Franca Squarciapino et Ezio Frigerio que nous avons connus plus inspirés. À voir le jeu des chanteurs, on comprend dès lors rapidement que la mise en scène créée à l'origine pour l'Opéra de Zurich, sera tout aussi convenue, même si elle transporte le drame à l'époque contemporaine de l'écriture de l'œuvre, et que la distribution ne sera rien de plus qu'honnête.
Cet opéra fleuve aux multiples personnages et situations nécessite une distribution de premier ordre pour que les nombreuses conventions franchissent la rampe.
L'orchestre est pourtant mené avec précision et nervosité, sans ces tapages si fréquents. Le plus bel exemple de musicalité s'exprime lors de l'ouverture de l'Acte III.
Les interprètes féminines ne déshonorent certes pas la partition mais nous laissent quelque peu indifférent. Quelques accents de Violeta Urmana peuvent toucher mais, très vite, sa grande voix efficace et sans âme reprend le dessus. La Preziosilla de la mezzo russe Julia Gertseva est très à l'aise sur le plan scénique, sa bohémienne est énergique et séduisante, mais force est de reconnaître que la voix ne suit pas et que notes et syllabes forment plus une bouillie musicale qu'autre chose.
Du côté des chanteurs, Roberto Scandiuzzi interprète un Père supérieur très convaincant. Quant au ténor Marcello Giordani, s'il ne possède pas une présence à galvaniser les foules, il ne démérite nullement et sait émouvoir en officier blessé dans l'Acte III. Mais c'est le baryton Carlo Guelfi qui, avec son Don Carlo di Vargas, relève l'intérêt de cette représentation.
Plus que tout, c'est enfin au chœur que nous devons la plus belle expression. Puissant au-dessus de l'orchestre superbement tendu dans "Il santo nome di Dio Signore", il sait aussi devenir sensible lorsqu'il devient l'écrin de la soprano dans "La Vergine degli Angeli" (Acte II).
Au final, l'ensemble s'avère correct mais ne nous entraîne pas plus loin que le fauteuil de spectateur sur lequel nous commençons à trouver le temps un peu long.
Pour Info : Cette Forza del destino est également disponible en DVD chez TDK/Intégral Distribution.
Philippe Banel