Le premier Simon Boccanegra n'eut pas beaucoup de succès, en vertu de quoi Verdi accepta de faire des modifications livresques et musicales près de 25 ans plus tard, entre Aida et Otello. Ces transformations de l’œuvre originale aboutirent à un chef-d’œuvre. En effet, la partie instrumentale de cet opéra est une merveille en bien des points – les brefs préludes, par exemple – et l'accompagnement des chanteurs est si travaillé qu'il pourrait souvent se passer des voix ! La direction de Daniele Callegari affiche la finesse nécessaire pour soutenir les chanteurs tout en sachant mettre en valeur les richesses orchestrales. Simon Boccanegra est un de ces opéras qui ont besoin d'un grand directeur d'orchestre, et l'on trouve dans cette version le bel équilibre souhaité.
Si la mise en scène de Giorgio Gallione est assez statique, elle respecte la chronologie en nous gratifiant d'élégants costumes du XIVe siècle italien, de belles façades architecturales sculptées et polychromes bien dans le goût de la Renaissance, et surtout une magnifique reconstitution d'un sol en mosaïque bleue et blanche du meilleur effet. Cette partie du décor servira de fil conducteur iconographique durant tout le déroulement de l'opéra. Aucune surcharge dans cette production et les lumières se chargent d'installer l'ambiance nocturne et sombre du drame.
La distribution vocale de Simon Boccanegra a ceci de particulier qu'elle ne comprend, outre le traditionnel ténor, qu'un rôle féminin d'envergure, mais aussi et surtout deux basses et un baryton.
Leo Nucci est parfait en Simon, tout en expression de vengeance mais aussi d’humanité. La voix a de la profondeur, de la couleur, de la tenue. Roberto Scandiuzzi prête son timbre de basse impressionnante, grondante et chaude à Jacopo Fiesco, et Simone Piazzola, baryton à peine plus léger, incarne un Paolo Albiani de belle facture. Avec ces voix, les face-à-face deviennent saisissants.
Le ténor Francesco Meli possède une couleur claire mais sa bonne assise vocale lui permet de donner du poids aux notes aiguës et graves de la partie de Gabriele Adorno. Aussi performant que ses partenaires en matière de tenue de souffle, son air de l'Acte II déclenche des applaudissements amplement mérités.
Quant à Tamar Iveri, seule soprano de l’œuvre, elle parvient à donner le ton dès la première scène de l'Acte I. Sa belle tenue de chant, sa puissance, son jeu émouvant et sa présence scénique lui permettent de faire face à ses partenaires masculins sans problème.Au sein de l'intégrale Tutto Verdi éditée par C Major dans le cadre du bicentenaire de la naissance du compositeur, ce Simon Boccanegra occupe une très bonne place.
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Nicolas Mesnier-Nature