De toutes les versions des Quatre Saisons de Vivaldi enregistrés pour le disque, seuls émergent quelques magnifiques témoignages dont le sommet absolu est occupé pour nous depuis 1991 par Fabio Biondi et L'Europa Galante sorti en CD chez Opus 111. Aussi, difficile de juger chaque nouvelle version autrement qu'à l'aune de cette référence fantasque, ébouriffante et stupéfiante. Mais, s'il existe pléthore de disques, on compte peu de captations filmées de l'œuvre. Or c'est le choix retenu pour ce DVD par Les Solistes Français.
La formation est composée de neuf instrumentistes - cinq violons, un alto, un violoncelle, une contrebasse et un clavecin - et cela suffit amplement pour servir Les Quatre Saisons. D'un point de vue strictement musical, les musiciens des Solistes Français s'inscrivent dans un axe de qualité. Les tempos choisis sont vifs, le grain des instruments jamais trop acide et le violon principal de Paul Rouger assure un premier plan d'une belle et constante musicalité. La caméra capte l'attention dont les instrumentistes font preuve entre eux et la prise de son révèle très bien cette sensibilité à l'autre.
Notre ressenti se conjugue bien sûr aussi avec l'aspect cinématographique de ce programme.
Mas Belsito n'a pas filmé platement un concert, et si certains partis pris peuvent surprendre, tels ces instrumentistes installés sur des cubes, l'ensemble se montre d'assez bon goût. Le fond noir omniprésent sert à mettre en relief les musiciennes et musiciens tout de blanc vêtus. Ni habits d'époque ni perruques, donc, mais une sobriété bienvenue renforcée par un éclairage sophistiqué en partie créé par des bougies judicieusement disposées. Des musiciens festoient autour d'une table richement dressée, les flammes éclairent les visages cadrés de près, des reflets colorés jouent sur les carnations… Ces images ne sont pas sans rappeler certains tableaux du Caravage. Aussi, saluons le travail du directeur de la photographie Dimitri Burdzelian. Il faut en outre remarquer que les choix de mise en scène de ces Quatre Saisons n'envahissent pas la musique car la scénarisation demeure légère et le montage évite toute outrance de plans rapides et se montre constamment musical. Le son enregistré un mois avant les images est bien synchronisé et le film se déroule avec une grande fluidité.
Avant chaque mouvement, et après un fondu au noir, une voix italienne - non créditée - au timbre agréable récite les sonnets voulus par Vivaldi et placés précisément sur son manuscrit. Ils apparaissent ensuite en accompagnement de la musique sous forme de sous-titres français (anglais optionnel) aux moments voulus par le compositeur.
Au final, cette petite production décalée par rapport aux habituelles captations de concerts, réussit à installer une ambiance musicale et visuelle empreinte d'une certaine nostalgie…
Nicolas Mesnier-Nature